C'est vraiment une venue, une arrivée, plus qu'une apparition soudaine, car dans le sommeil, le cerveau agit comme un ordinateur tournant à petite vitesse, et balaierait par ci par là des bribes éparses, jusqu'à ce que la pensée vienne, et surgisse, comme un tour de décolettage s'arrêtre, une fois la pièce finie. Cela tourne, jusqu'a ce que la pensée vienne, et s'arrête. La plupart du temps, la pelote se dévide, infinie, puis touche une autre, se tricote, puis s'arrête, car les deux ne sont pas cohérentes, et le travail continue, souterrain, jusqu'a apparaitre.
Mais peut être est ce un fonctionnement qui n'est pas général, et m'est particulier. En tout cas, depuis quelques jours, les idées "tournaient" sur la mondialisation, la syrie, le devenir de la Chine, l'avenir de la Palestine, la crise ici en Europe, la réaction des peuples, qu'on voit très différentes, sur Dali, ("la différence avec un fou, c'est que moi je ne suis pas fou"), sur les vins aussi, sur le progrès, et allez savoir pourquoi, sur Bossuet..S'y mêlait aussi le sentiment étrange que quelque part, toute notre vie, nous restons au moins pour nous l'enfant que nous fûmes, avec ces yeux de cinq ans, et au moins son étonnement. Bref, toutes ces balles de ping pong sautaient en l'air, chacune ayant sa trajectoire, sans que l'ensemble apparaisse.
Oui, l'âge nous saisit, nous apprend, nous apporte des expériences, des épreuves, mais nous sommes au fond toujours celui que nous avons été, sans être exactement le même. C'est alors que le Passé apparaît, dans ses déterminismes, ou ses lecons, ou ses échos. Oui, échos du Passé, comme en descendant la rue du Bac, voyant chez Deyrolles ces images de classes de jadis, tout me revient justement de ces classes, des points de cette époque, et pourtant le cerveau n'est qu'un assemblage de circuits +/- , avec des polarités changeants selon les affects. Bref, on pourrait dire que nous sommes en quelque sorte des circuits électriques, avec un programme qui s'est formé dans la tendre enfance, tendre ou pas d'ailleurs, et qui fonctionne, consciemment ou pas, la vie durant. Si bien qu'en 2012, nous sommes à la fois en 2012, et ce que nous fumes en 1958, à 5 ans, donc relativité de l'espace temps. Simplement avec une expérience différente.
J'avais donc relu la Bruyère et ses strophes sur les "esprits forts", puis quelques pages de Bossuet. Par comparaison avec la TV de la veille, que j'ai oubliée, j'ai réalisé que, moi vivant en 2012, au coeur de Paris, j'avais plus de "proximité" disons de clés et d'affects pour des personnages du XVIII eme siècle que pour des figures contemporaines fameuses comme les pussy riots ou justin bieber. Que finalement, quelque part, accident ou pas, je me sentais mieux au XVIIIeme siècle, qu'aujourd'hui, au moins sur le plan mental. Qu'en quelque sorte, j'étais plus proche, au moins par le raisonnement, l'approche, de personnes ayant vécu il y a 400 ans que maintenant. Relativité de la pensée par rapport à son temps lui même.
Ca s'est prolongé par une autre réflexion, que graphologue amateur, je poursuis depuis longtemps, l'évolution des écritures depuis deux cent ans, et surtout les 30 dernières années..et qui m'a amené à la notion de progrès. Le progrès absolu. Y a t'il eu progrès ? une écriture ordinaire il y a 50 ans ou 100 ans, est claire, nette, structurée, controlée, bonne ou méchante, mais révèle des âmes fortes ou simples, mais pas quelconques. La plupart de celles d'aujourd'hui sont souvent narcissiques, malheureuses, et trop souvent immatures ou artificielles. En quelque sorte, que savons nous de notre époque, de ses fleuves souterrains, comment la juger ? comment savoir si le cerveau humain a progressé ? le XX° siècle n'est t'il pas pavé des plus grands massacres de l'humanité ?
Poursuivant mon survol des siècles, et me jouant moi même Jacquouille la Fripouille, j'ai pris quelques personnages, comme Louis XIV, La Fayette, Clemenceau, et je les ai amenés en 2012. Comprendraient ils notre époque, en auraient ils les clés ? ou même, pour prendre plus moderne, Picasso et Marie Bonaparte, que verraient ils ? et même Dali ? sans doute le paysan sibérien, mais quid du trader singapourien dans son building climatisé.
Un immense fossé avec leur Temps. mais justement, ces fortes personnalités diraient elles que nous avons fait "des progrès" sur le plan humain ? sans doute sur le plan médical, scientifique, transports (il fallait sous louis xiv une semaine pour aller de Paris à Moulins), mais quels seraient aujourd'hui les yeux de Stendhal sur le Languedoc, qu'il parcourut vers 1830, c'est à dire moins de deux siècles ?
Y a t'il aujourd'hui un personnage qui ait l'énergie de Richelieu, la vision de Colbert, le goût de Louis XIV ? Quand on pense à la formidable vague d'artistes de toutes sortes jaillissant sous Louis XIV, dans tous les domaines, Molière, Racine, Corneille, pour le théatre, Mignard, le Brun, Clouet, etc pour la peinture, Mansart, le Vau pour l'architecture, Lulli, Delalande, pour la musique, on peut penser que le soutien du Roy intervient, pour la France. Mais on trouve sans roi Buxtehude en Allemagne, Purcell en Angleterre, Caravage en Italie, etc, bref un foisonnement, un feu d'artifices inexplicable. mais de géants en tout cas.
Toujours pour situer la relativité d'une pensée par rapport à une autre, en cette même année 2012, je pense que le nouveau président de la Chine est à la fois proche de Louis XIV, par le pouvoir, sa tradition, de ses contemporains, certes, puisque vivant en notre époque, des paysans chinois au fin fond des campagnes, tout en vivant à l'heure probable de l'informatique. Bref, il est l'exemple même de la personne plongée dans un jeu à dix mille balles de flipper, venants de toute part, de toutes époques, de toute pensée (enfin, au moins traditionnelle et semi moderne..). Louis XIV pouvait avoir une vision horizontale, nous en sommes à la vision Lectra (c'est à dire devant changer en permanence d'années et de milieux), en permanence, sans que notre esport ait été formé à cela, et puisse décrypter en permanence. Et nécessité de rendre cohérent tout cela, sous peine de "sauter". Dieu, le boson, les pussy riots, la ferrari, la dacia, l'enfance, le futur.
Toujours pour situer la relativité d'une pensée par rapport à une autre, en cette même année 2012, je pense que le nouveau président de la Chine est à la fois proche de Louis XIV, par le pouvoir, sa tradition, de ses contemporains, certes, puisque vivant en notre époque, des paysans chinois au fin fond des campagnes, tout en vivant à l'heure probable de l'informatique. Bref, il est l'exemple même de la personne plongée dans un jeu à dix mille balles de flipper, venants de toute part, de toutes époques, de toute pensée (enfin, au moins traditionnelle et semi moderne..). Louis XIV pouvait avoir une vision horizontale, nous en sommes à la vision Lectra (c'est à dire devant changer en permanence d'années et de milieux), en permanence, sans que notre esport ait été formé à cela, et puisse décrypter en permanence. Et nécessité de rendre cohérent tout cela, sous peine de "sauter". Dieu, le boson, les pussy riots, la ferrari, la dacia, l'enfance, le futur.
La deuxième réflexion me vint, mystérieuse, car c'était plus une confirmation qu'une déduction, en écoutant cinq économistes "non classiques" disserter sur la crise. Chacun y allait de son analyse sur les raisons, mais s'arrêtait, à mon avis, en chemin. Sans aller au fond. Sans toucher au fondamental.
Certes, ils s'accordaient tous sur les méfaits de M. GREENSPAN, et de sa politique, non de taux, mais d'easy money, c'est à dire de planches à billets pendant des années. Et ils ne nommèrent pas le privilège du dollar, monnaie de réserve que nul -jusqu'à présent - ne conteste. Pourtant ce que font les USA en ce moment, n'est ce pas donner un bout de papier, marqué 10.000 $, pour tout acheter ? Mais la réussite des USA en ce moment, ce n'est pas l'iphone, mais le dollar !
Mais ils n'allèrent pas non plus jusqu'à proposer des remèdes ou des solutions à la crise. Leur science n'allait pas jusque là. Il y a quelques années, pourtant, on parlait abondamment de la crise de 1929, et il est vrai que l'Histoire, sans être identique, pourrait apporter des lecons.
La première, c'est que cette crise fut aussi provoquée par les USA et par un excès de liquidités faciles, alimentant en 1929 une bulle boursière. En 2007, la bulle était partiellement boursière, partiellement immobilière, du fait de la titrisation des emprunts immobiliers.
Dans les deux cas, on voit un effet d'un excès bancaire. Roosevelt d'ailleurs prendra des mesures extremement sévères vers 1937 pour remedier à cela, mesures qui seront supprimées, sauf erreur de ma part, par Clinton en 1997, comme par hasard.
Bref, n'allons pas plus loin dans cette direction, juste pour souligner qu'aujourd'hui les solutions proposées, en Europe notamment, vont de la planche à billets britannique, tournant sur son île, au garrot espagnol version Merkel. Pour ceux qui l'ignoreraient le garrot n'est pas un pansement, mais une facon de serrer le cou jusqu'a ce que la mort s'ensuive...
Même les néo libéraux ont oublié la gloire qu'ils tissaient à l'Espagne avant 2007 : budget en excès de 7 %, alors que nous étions déjà en déficit, taux de chomage insignifiant puisqu'il fallait importer des sud américains en grand nombre, presque un million, et endettement public voisin de 40 %, ce qui en faisait un bon élève, et M. AZNAR pouvait pousser sa moustache vers les amis américains. Les banques espagnoles, les travaux publics étaient les plus prospères d'Europe...Pensez, l'Espagne a construit pendant dix ans plus de logements que la France et la Grande Bretagne réunies. Sauf que les logements ont fini par ne plus être vendus, et quand vendus, par être payés ou remboursés.
Sur une chose aussi fondamentale "que peut on faire pour sortir de ce merdier" on voit que personne n'a une solution cohérente et globale (moratoire des dettes..soutien public ou non ? libéralisation), mais chacun veille sur sa chapelle, qui protégeant ses banques, qui protégeant son industrie. Il est donc probable que chacun, à son niveau, a une analyse différente de la crise, et réagit partiellement en fonction de sa vision.
D'où relativité de l'analyse, et des solutions à mettre en oeuvre. Mais il y a aussi des scléroses de la pensée, qui tourne bien souvent à vide. Pendant que l'Espagne affiche 25 % de taux de chomâge, qui sait que la Suisse, l'Autriche sont en plein emploi ? cette simple évidence mériterait quand même de soulever le coin du tapis. Faut il mettre cela sur le compte des vaches et des alpages ?
Il y a aussi d'autres faits qui sont pour le moins singuliers dans ce bas monde. Le Japon est presque endormi depuis 1989, que s'y passe t'il ? un endettement public de 200 % du PIB, des leaders mondiaux industriels en quasi faillite, après avoir dominé le monde (Sony, Sharp, etc), une natalité nulle .Pourquoi cet arrêt ? le changement de générations ?
En revanche, de petits pays (est ce la soif de revanche ?), telle la Corée et Taïwan sont en pointe dans l'électronique de très haut niveau, tout en ayant une population, au moins pour la Corée, mécontente ?
Eh bien, toutes ces difficultés viennent de ce que nous sommes incapables de structurer, hiérarchiser des choses différentes et parfois non connectées . Comme disait Pascal "embrasser le tout" à propos de l'esprit de géométrie et de finesse. Longtemps j'ai pensé que les petits peuples (pour simplifier Israel ou la Suisse) avaient un avantage de fonctionnement sur les grands pays, car plus faciles à actionner, plus homogènes, mais la suisse n'est pas elle pas une mosaique de cantons différents, de langues très différentes sur une petite surface ?
Si l'on cherche, on finirait par arriver au génie des peuples, je pense. Le suisse veut sa maison et sa vue, donc travaille dur, en paysan qu'il est resté. Bref, chaque peuple se concentre, ou se programme, sur son essentiel, sa racine, son programme intrinsèque, comme si rien ne changeait, ou si peu. Les allemands ont toujours eu ces deux faces : grand peuple travailleur, mais aimant aussi son confort et ses vacances, ou ses autos propres. C'est à dire qu'ils répètent le message de JS BACH il y a trois cent ans "quiconque travaillera autant que moi fera aussi bien". Pourquoi les peuples changeraient ils quand nous changeons si peu, au delà des apparences ?
C'est dire que nous sommes prisonniers de nos raisonnements, de nos peurs, de nos succès aussi, mais les prisons mentales sont immenses et différentes, à la fois dans le temps, l'espace et le lieu. Archipel du Goulag ou nous nous sommes, presque volontairement, en tout cas inconsciemment, et dont pourtant il faut sortir pour parler à l'autre, ne serait ce que du réchauffement climatique. Prendre conscience de ses propres barreaux, et néanmoins être capable de faire preuve d'empathie, pour se mettre à la place des autres, une autre époque, un autre lieu. Quelle gymnatisque désormais, surtout que les mentalités désormais sont multiples.
Le chomâge par exemple est il un mal ? certainement pas pour un libéralisme bon teint, mais beaucoup pour un socialiste grand teint. pourquoi la même chose est elle percue différemment ?
Pourtant, si l'on raisonne sans parti pris, comme une communauté religieuse, dont le moteur ne serait pas le profit, le chômage c'est du temps libre, donc de la liberté, du temps pour soi et pour les autres, la liberté de faire ce que l'on veut, de lire, de se promener, de voir des gens. Le problème réel, et tragique, c'est l'absence de revenus.
Il ne serait pas venu à la duchesse de Sabran l'idée de travailler, de prendre le métro sale et bruyant à 7 H du matin dans la nuit froide, pour atteindre une banlieue sinistre où dans un bureau froid il aurait fallu se pencher sur des choses sans intérêt réel pour être harcelé par un patron névrosé et malade. Et sans doute aurait elle eu raison, au delà de l'époque. Mais elle avait des revenus, ce qui l'en dispensait.
C'est assez schématique, mais non faux. J'avais été frappé jadis par la cuisine de Malagar, restée comme en 1969, et qui me parut en 2005 d'une pauvreté effrayante, même pour moi contemporain. Le sol était en terre battue, sombre, des casseroles hors d'âge, un fourneau malingre, était ce la la cuisine du Prix Nobel, de l'homme qui avait plus de 1000 hectares de pin landais, dont les livres se vendaient , et qui avait chauffeur, et passait sa saison à Lucerne ?
Certes, c'était celle de sa cuisinière à la campagne. Mais connaissant des campagnes plus pauvres à la meme époque, combien étaient elles plus convenables, confortables, avec frigo deja, cuisinière électrique, sol carrelé...
C'etait donc en quelque sorte une vision de la vie, un choix, qui s'imposait, comme si un niveau d'exigences n'y arrivait pas. Comme il m'apparait impossible, irréel, fou de voir des vins vendus à 5000, ou 10000 € !! le vin est certes sacré, mais vaut il vraiment cela ? j'ai lu récemment l'histoire de cet homme qui aurait la plus belle cave du monde, 30 millions € parait il. J'aurais peur que tout s'abîme, car le vin évolue, change. Et quelques bouteilles méritent autant d'efforts ? Je n'arrive pas à comprendre une telle passion, accumuler pour le record, sans distance.
Justement, on en revient à la notion de progrès. La semaine dernière, ma femme a monté de la cave une bouteille sans etiquette sans capsule. Donc que nous avions embouteillée nous même, à la cave. Mon cerveau patine, qu'était ce ?
C'ést encore buvable, sans doute une dizaine d'années. Le bouchon est abîmé, mais le vin est rond, plaisant, avec des dépôts partout. Ah pourquoi filtre t'on autant aujourd'hui, alors que le vin finalement est tel que !! d'abord, je pense à un vin de loire, à un chinon. Mais ce n'est pas possible. Les connections jouent. C'est probablement une syrah de 1996 ou de 1998. Je dirais 1998, car ce fut la première bonne année, ronde, qu'on retrouve encore dans les Sabran de l'époque.
Une certaine nostalgie m'a alors saisi. 14 ans avaient passé depuis ce vin, stocké par ailleurs dans une mauvaise cave (car trop chaude auparavant). Mais les vins de Mattes justement ont ils fait des progrès, et ces progres ne valaient ils pas trop cher ? je veux dire en terme d'efforts.
Il faudrait que maintenant, 2012, je puisse goûter les vins tels qu'ils seront en 2026, 14 ans plus tard. Mais là, je me heurte au mur du futur.
Ce que j'ai appris, et là aussi l'enfant que je suis encore l'a appris sans être changé fondamentalement, c'est une autre évidence, à savoir que le vin est comme la cuisine, la main de la cuisinière change le goût. En 14 ans, Mattes a connu 3 régisseurs, et sans que les choses soient semblables en tout point, il est indéniable que chacun a modelé "ses vins".
C'est largement vrai sur un vin disons mono critère, comme le CLOS REDON qui ne fait appel qu'à la syrah. Les parcelles ont été augmentées, les clones changés, le temps aussi, mais quand on regarde ces vins, sur les différentes époques, le style en est différent, indéniablement. L'une est moins concentrée, plus simple, un peu plus animale, l'autre est plus mûre, plus riche, plus lente à évoluer, mais plus monocolore, la dernière serait plus fruitée, vive, sautillante. Si bien que plus de terroirs comme on se complait à le dire, je parlerais de vignerons.
Les salades cet été m'ont confirmé ces degrés, les gâteaux aussi. Des horreurs standardisées de grande surface ou de marchés à touristes, quelle surprise parfois de trouver une salade à l'ancienne, c'est à dire sentant le frais, ferme sans être dure, et ayant du goût. Sans tomber dans la complainte du bon vieux temps, la salade a t'elle fait du progres en 40 ans ? certainement pas. Cela veut bien dire que dans certains domaines, nous n'allons pas dans la bonne direction.
Ce qu'il y a peut être de plus étrange dans notre époque, par ailleurs passionnante par tout ce bouillonnement multiple et général, c'est peut être justement de voir qu'elle oublie de se demander ce qu'elle veut et ne veut pas, ce qui est fondamental et accessoire, bref les directions vers lesquelles elle veut aller, de la salade, aux vins, à l'conomie, aux dettes, à la vie, à la mort...
On a souvent tort d'oublier le passé, de ne pas s'y plonger,de peur de faire preuve de nostalgie. J'ai quelque part un livre de 1725, l'Art de la Vigne. J'avais étonné que maintes conclusions de cet ouvrage écrit à une epoque où la science était balbutiante, empirique, étaient profondément vraies, pleines de choses tirées de l'observation. De l'intérêt des vignes de côteaux, d'attendre une maturité suffisante, de bien labourer, de fumer raisonnablement, de travailler dans une cave propre, etc, de la futaille aussi en bon état.
L'Homme a t'il vraiment évolué en trois siècles ? même à l'échelle des vins, et du Monde, le résultat semble bien modeste.
Certes, ils s'accordaient tous sur les méfaits de M. GREENSPAN, et de sa politique, non de taux, mais d'easy money, c'est à dire de planches à billets pendant des années. Et ils ne nommèrent pas le privilège du dollar, monnaie de réserve que nul -jusqu'à présent - ne conteste. Pourtant ce que font les USA en ce moment, n'est ce pas donner un bout de papier, marqué 10.000 $, pour tout acheter ? Mais la réussite des USA en ce moment, ce n'est pas l'iphone, mais le dollar !
Mais ils n'allèrent pas non plus jusqu'à proposer des remèdes ou des solutions à la crise. Leur science n'allait pas jusque là. Il y a quelques années, pourtant, on parlait abondamment de la crise de 1929, et il est vrai que l'Histoire, sans être identique, pourrait apporter des lecons.
La première, c'est que cette crise fut aussi provoquée par les USA et par un excès de liquidités faciles, alimentant en 1929 une bulle boursière. En 2007, la bulle était partiellement boursière, partiellement immobilière, du fait de la titrisation des emprunts immobiliers.
Dans les deux cas, on voit un effet d'un excès bancaire. Roosevelt d'ailleurs prendra des mesures extremement sévères vers 1937 pour remedier à cela, mesures qui seront supprimées, sauf erreur de ma part, par Clinton en 1997, comme par hasard.
Bref, n'allons pas plus loin dans cette direction, juste pour souligner qu'aujourd'hui les solutions proposées, en Europe notamment, vont de la planche à billets britannique, tournant sur son île, au garrot espagnol version Merkel. Pour ceux qui l'ignoreraient le garrot n'est pas un pansement, mais une facon de serrer le cou jusqu'a ce que la mort s'ensuive...
Même les néo libéraux ont oublié la gloire qu'ils tissaient à l'Espagne avant 2007 : budget en excès de 7 %, alors que nous étions déjà en déficit, taux de chomage insignifiant puisqu'il fallait importer des sud américains en grand nombre, presque un million, et endettement public voisin de 40 %, ce qui en faisait un bon élève, et M. AZNAR pouvait pousser sa moustache vers les amis américains. Les banques espagnoles, les travaux publics étaient les plus prospères d'Europe...Pensez, l'Espagne a construit pendant dix ans plus de logements que la France et la Grande Bretagne réunies. Sauf que les logements ont fini par ne plus être vendus, et quand vendus, par être payés ou remboursés.
Sur une chose aussi fondamentale "que peut on faire pour sortir de ce merdier" on voit que personne n'a une solution cohérente et globale (moratoire des dettes..soutien public ou non ? libéralisation), mais chacun veille sur sa chapelle, qui protégeant ses banques, qui protégeant son industrie. Il est donc probable que chacun, à son niveau, a une analyse différente de la crise, et réagit partiellement en fonction de sa vision.
D'où relativité de l'analyse, et des solutions à mettre en oeuvre. Mais il y a aussi des scléroses de la pensée, qui tourne bien souvent à vide. Pendant que l'Espagne affiche 25 % de taux de chomâge, qui sait que la Suisse, l'Autriche sont en plein emploi ? cette simple évidence mériterait quand même de soulever le coin du tapis. Faut il mettre cela sur le compte des vaches et des alpages ?
Il y a aussi d'autres faits qui sont pour le moins singuliers dans ce bas monde. Le Japon est presque endormi depuis 1989, que s'y passe t'il ? un endettement public de 200 % du PIB, des leaders mondiaux industriels en quasi faillite, après avoir dominé le monde (Sony, Sharp, etc), une natalité nulle .Pourquoi cet arrêt ? le changement de générations ?
En revanche, de petits pays (est ce la soif de revanche ?), telle la Corée et Taïwan sont en pointe dans l'électronique de très haut niveau, tout en ayant une population, au moins pour la Corée, mécontente ?
Eh bien, toutes ces difficultés viennent de ce que nous sommes incapables de structurer, hiérarchiser des choses différentes et parfois non connectées . Comme disait Pascal "embrasser le tout" à propos de l'esprit de géométrie et de finesse. Longtemps j'ai pensé que les petits peuples (pour simplifier Israel ou la Suisse) avaient un avantage de fonctionnement sur les grands pays, car plus faciles à actionner, plus homogènes, mais la suisse n'est pas elle pas une mosaique de cantons différents, de langues très différentes sur une petite surface ?
Si l'on cherche, on finirait par arriver au génie des peuples, je pense. Le suisse veut sa maison et sa vue, donc travaille dur, en paysan qu'il est resté. Bref, chaque peuple se concentre, ou se programme, sur son essentiel, sa racine, son programme intrinsèque, comme si rien ne changeait, ou si peu. Les allemands ont toujours eu ces deux faces : grand peuple travailleur, mais aimant aussi son confort et ses vacances, ou ses autos propres. C'est à dire qu'ils répètent le message de JS BACH il y a trois cent ans "quiconque travaillera autant que moi fera aussi bien". Pourquoi les peuples changeraient ils quand nous changeons si peu, au delà des apparences ?
C'est dire que nous sommes prisonniers de nos raisonnements, de nos peurs, de nos succès aussi, mais les prisons mentales sont immenses et différentes, à la fois dans le temps, l'espace et le lieu. Archipel du Goulag ou nous nous sommes, presque volontairement, en tout cas inconsciemment, et dont pourtant il faut sortir pour parler à l'autre, ne serait ce que du réchauffement climatique. Prendre conscience de ses propres barreaux, et néanmoins être capable de faire preuve d'empathie, pour se mettre à la place des autres, une autre époque, un autre lieu. Quelle gymnatisque désormais, surtout que les mentalités désormais sont multiples.
Le chomâge par exemple est il un mal ? certainement pas pour un libéralisme bon teint, mais beaucoup pour un socialiste grand teint. pourquoi la même chose est elle percue différemment ?
Pourtant, si l'on raisonne sans parti pris, comme une communauté religieuse, dont le moteur ne serait pas le profit, le chômage c'est du temps libre, donc de la liberté, du temps pour soi et pour les autres, la liberté de faire ce que l'on veut, de lire, de se promener, de voir des gens. Le problème réel, et tragique, c'est l'absence de revenus.
Il ne serait pas venu à la duchesse de Sabran l'idée de travailler, de prendre le métro sale et bruyant à 7 H du matin dans la nuit froide, pour atteindre une banlieue sinistre où dans un bureau froid il aurait fallu se pencher sur des choses sans intérêt réel pour être harcelé par un patron névrosé et malade. Et sans doute aurait elle eu raison, au delà de l'époque. Mais elle avait des revenus, ce qui l'en dispensait.
C'est assez schématique, mais non faux. J'avais été frappé jadis par la cuisine de Malagar, restée comme en 1969, et qui me parut en 2005 d'une pauvreté effrayante, même pour moi contemporain. Le sol était en terre battue, sombre, des casseroles hors d'âge, un fourneau malingre, était ce la la cuisine du Prix Nobel, de l'homme qui avait plus de 1000 hectares de pin landais, dont les livres se vendaient , et qui avait chauffeur, et passait sa saison à Lucerne ?
Certes, c'était celle de sa cuisinière à la campagne. Mais connaissant des campagnes plus pauvres à la meme époque, combien étaient elles plus convenables, confortables, avec frigo deja, cuisinière électrique, sol carrelé...
C'etait donc en quelque sorte une vision de la vie, un choix, qui s'imposait, comme si un niveau d'exigences n'y arrivait pas. Comme il m'apparait impossible, irréel, fou de voir des vins vendus à 5000, ou 10000 € !! le vin est certes sacré, mais vaut il vraiment cela ? j'ai lu récemment l'histoire de cet homme qui aurait la plus belle cave du monde, 30 millions € parait il. J'aurais peur que tout s'abîme, car le vin évolue, change. Et quelques bouteilles méritent autant d'efforts ? Je n'arrive pas à comprendre une telle passion, accumuler pour le record, sans distance.
Justement, on en revient à la notion de progrès. La semaine dernière, ma femme a monté de la cave une bouteille sans etiquette sans capsule. Donc que nous avions embouteillée nous même, à la cave. Mon cerveau patine, qu'était ce ?
C'ést encore buvable, sans doute une dizaine d'années. Le bouchon est abîmé, mais le vin est rond, plaisant, avec des dépôts partout. Ah pourquoi filtre t'on autant aujourd'hui, alors que le vin finalement est tel que !! d'abord, je pense à un vin de loire, à un chinon. Mais ce n'est pas possible. Les connections jouent. C'est probablement une syrah de 1996 ou de 1998. Je dirais 1998, car ce fut la première bonne année, ronde, qu'on retrouve encore dans les Sabran de l'époque.
Une certaine nostalgie m'a alors saisi. 14 ans avaient passé depuis ce vin, stocké par ailleurs dans une mauvaise cave (car trop chaude auparavant). Mais les vins de Mattes justement ont ils fait des progrès, et ces progres ne valaient ils pas trop cher ? je veux dire en terme d'efforts.
Il faudrait que maintenant, 2012, je puisse goûter les vins tels qu'ils seront en 2026, 14 ans plus tard. Mais là, je me heurte au mur du futur.
Ce que j'ai appris, et là aussi l'enfant que je suis encore l'a appris sans être changé fondamentalement, c'est une autre évidence, à savoir que le vin est comme la cuisine, la main de la cuisinière change le goût. En 14 ans, Mattes a connu 3 régisseurs, et sans que les choses soient semblables en tout point, il est indéniable que chacun a modelé "ses vins".
C'est largement vrai sur un vin disons mono critère, comme le CLOS REDON qui ne fait appel qu'à la syrah. Les parcelles ont été augmentées, les clones changés, le temps aussi, mais quand on regarde ces vins, sur les différentes époques, le style en est différent, indéniablement. L'une est moins concentrée, plus simple, un peu plus animale, l'autre est plus mûre, plus riche, plus lente à évoluer, mais plus monocolore, la dernière serait plus fruitée, vive, sautillante. Si bien que plus de terroirs comme on se complait à le dire, je parlerais de vignerons.
Les salades cet été m'ont confirmé ces degrés, les gâteaux aussi. Des horreurs standardisées de grande surface ou de marchés à touristes, quelle surprise parfois de trouver une salade à l'ancienne, c'est à dire sentant le frais, ferme sans être dure, et ayant du goût. Sans tomber dans la complainte du bon vieux temps, la salade a t'elle fait du progres en 40 ans ? certainement pas. Cela veut bien dire que dans certains domaines, nous n'allons pas dans la bonne direction.
Ce qu'il y a peut être de plus étrange dans notre époque, par ailleurs passionnante par tout ce bouillonnement multiple et général, c'est peut être justement de voir qu'elle oublie de se demander ce qu'elle veut et ne veut pas, ce qui est fondamental et accessoire, bref les directions vers lesquelles elle veut aller, de la salade, aux vins, à l'conomie, aux dettes, à la vie, à la mort...
On a souvent tort d'oublier le passé, de ne pas s'y plonger,de peur de faire preuve de nostalgie. J'ai quelque part un livre de 1725, l'Art de la Vigne. J'avais étonné que maintes conclusions de cet ouvrage écrit à une epoque où la science était balbutiante, empirique, étaient profondément vraies, pleines de choses tirées de l'observation. De l'intérêt des vignes de côteaux, d'attendre une maturité suffisante, de bien labourer, de fumer raisonnablement, de travailler dans une cave propre, etc, de la futaille aussi en bon état.
L'Homme a t'il vraiment évolué en trois siècles ? même à l'échelle des vins, et du Monde, le résultat semble bien modeste.
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